Conséquence d'un repas imprévu - ft Amélia

Sortir pour se changer les idées, sur papier, c'est bien. Dans la réalité, je me retrouve avec un type collé à mes basques. Pas méchant, mais qui est apparemment sourd à tous mes refus. Non je ne veux pas boire un verre, ni venir à la soirée où il se rend et encore moins le suivre chez lui.

Inlassablement les propositions s'enchaînent tandis qu'il me suit dans la ruelle dans laquelle je m'engage.

- C'est pas très prudent d'être seule ici mademoiselle, heureusement que je suis avec vous.

Il prêche une convertie, vu que c'est dans ce genre d'endroit où je suis morte. Mais maintenant c'est le cadet de les soucis.

Je l'entends, sans véritablement l'écouter, me proposer un nouveau plan pour la soirée. Je rejoins une rue mieux éclairée mais toujours déserte, avec l'envie de plus en plus tenace de le faire taire. Je ne réponds même plus à ces requêtes, lassée. Je suis gentille, assez patiente, mais il semblerait que j'ai atteint mes limites et qu'une pointe de faim commence à me titiller l'esprit. Je m'arrête sur le trottoir et l'inconnu lourdingue se stoppe quelques pas plus loin.

- Un problème, mademoiselle ?
- J'aimerais que vous me laissiez tranquille.

Pour votre bien, complète-je dans ma tête.

- Mais je vous embête pas ! Je m'assure qu'il ne vous arrive rien ! C'est pas prudent pour une jolie demoiselle de se promener seule la nuit.

Je le fixe, sans aucune réaction. Trop de réponses me viennent à l'esprit, certaines laconiques et d'autres possédant une pointe d'humour, mais en cet instant je n'ai pas l'envie de faire d'autres efforts. Combien de temps je le supporte lui et ses propositions agaçantes ? Un peu trop longtemps apparemment.

- Ce qui n'est pas prudent, c'est de parler à des inconnus.
- Inconnu, tout de suite les grands mots... On commence à se connaître non ?

Sa gestuelle est exagéré au possible. Il devrait tenter le théâtre, il serait peut-être doué. Il fait un pas dans ma direction, tout sourire, une main s'approchant de mon bras, avant qu'il ne se fige. Il y aune altération dans sa posture, un léger relâchement de sa bouche, qui m'indique qu'il est soudainement moins enjoué de m'avoir si proche de lui.

- Un problème ?

La pointe d'amusement qui transparaît dans ma voix me surprend moi-même et mon sourire s'en trouve agrandi lorsque je l'entends bafouiller :

- J'aime pas ton regard, mademoiselle.

J'entends à peine son dernier mot, qui n'est plus qu'un murmure et me penche légèrement vers l'avant :

- J'imagine que non.

Le reste est trop rapide pour qu'il est le temps de réagir, même si dans un sursaut il tente de briser mon étreinte. Essai vain, qui ne me ralentit même pas dans l'exécution de mes plus bas instincts de prédateur. Et quelques secondes plus tard, plus aucune velléité de résistance n'émane de mon repas. Je l'avais prévenu non ? On ne sait jamais sur qui on tombe de nos jours... Un court instant mes pensées s'effacent au profit de la sensation de plénitude que j'éprouve, avant de me forcer à reprendre pied avec la réalité. Je n'ai pas envie de me retrouver avec un cadavre sur les bras, alors je retire mes crocs du cou de ma victime, qui pend mollement dans mes bras. Véritable poupée de chiffon que je laisse choir contre le mur. Vu le coin, les gens penseront à un mec bourré qui décuve. Je chasse mes derniers remords en m'auto persuadant que je lui avait demandé plusieurs fois de me foutre la paix, et que s'il m'avait écouté rien ne serait arrivé. Sans aucun autre regard pour lui je reprends ma route, alors qu'une odeur de parfum légèrement sucré me vient aux narines. Je me retourne, pour constater qu'à une dizaine de mètres, une témoin potentiel se dresse.

Merde.

Il n'y a aucune rue adjacente desquelles elle aurait pu sortir au dernier moment et louper toute l'action. Les options qui s'offrent à moi sont nombreuses. Fuir, me débarrasser du problème, dialoguer... et tant d'autres que je ne prends pas en considération, mon corps se mettant en mouvement vers la silhouette. Il y a quelque chose qui m'intrigue, et je comble rapidement les mètres qui nous séparent. Pourtant, alors que j'arrive à ses côtés avec une célérité peu commune, il n'y a aucun mouvement de recul, ni soupçon de peur, ce qui aiguise ma curiosité et range au placard toute potentielle agressivité que j'ai pu avoir à son égard. Je détaille rapidement la jeune femme avant de me fendre d'un léger sourire. Rien ne me semble menaçant chez elle, ce qui ne m'empêchera pas d'être sur mes gardes.

- Bonsoir. J'imagine que si vous restez ici sans partir en hurlant c'est que vous savez ce que je suis.

J'estime qu'il n'y a pas besoin de tourner autour du pot, alors je me permets même la plus élémentaire des politesses en me présentant :

- Elisabeth, mais vous pouvez faire comme tout le monde et m'appeler Liz.

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La lune est presque pleine ce soir. Elle éclaire bien les rues de la ville. Ca tombe bien puisque j'ai décidé de me balader un peu. J'ai reprit mon boulot en tant que top-modèle. Mes créations toujours au fond de mon tiroir. un jour peut-être j'oserais me lancer et envoyer mes projets à des boîtes, mais pour l'instant je défile sur les podiums. Je suis chanceuse. J'ai trouvé celle grâce à qui tout ça a été possible. Et d'ailleurs cette dite personne me tuera si je finis en sandwich d'un autre vampire qu'elle... enfin quand elle-même reviendra d'outre tombe ... J'ai un rire gêné à cette idée. Sylvana en poussière par ma faute. Je m'en voudrais véritablement, nous avons un tel lien elle et moi maintenant. L'imaginer 4 pieds sous terre ne me convient absolument pas, mais en même temps je ne peux pas prendre la fuite maintenant. Elle m'a vu. Elle s'approche déjà de moi vitesse grand V.
*Soit polie et aimable Amélia et elle te laissera rentrée chez toi!*

- Enchantée Liz, moi c'est Amélia. Oui j'en ai une petite idée. Je connais plusieurs vampires.

En réalité j'en connais surtout deux : Sylvana et son créateur Vladimir Tapes. Je ne sais pas si c'est une chance ou non, mais en tout cas je n'avais pas réussi à y échapper bien longtemps. Il s'était montré plus que froid à mon égard, mais je signifiais la mort potentiel de l'une de ses plus importantes infantes, l'un de ses plus fidèles lieutenants; si on peut dire ça comme ça. il n'avait pas apprécié "la blague". Mais au moins avec lui j'avais un allié de poids. Jamais aucun vampire saint d'esprit n'oserait s'en prendre à moi sous peine de se voir mourir sur le champ. Je crois que c'est un avantage... je crois!
Parce qu'au final comme ils faisaient pour savoir que j'étais le calice de l'un d'eux ? Est-ce que ça se sentait ? Tous les humains n'avaient pas la même odeur, alors peut-être que la mienne était encore différente ? Je n'en savais rien, mais bizarrement, je crois que j'allais bientôt le savoir, d'une manière ou d'une autre.

- Je ne voulais pas vous importuner durant votre dîner, je suis navrée. Je vais vous laisser! Et je vous promets que je ne dirais rien de ce que j'ai vu ce soir.

Alors ça si ça marche Amélia t'es la meilleure! Oui, non soyons honnêtes, je n'y crois pas du tout.

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Lorsque l'inconnue -Amélia- avoue connaître d'autres vampires, il n'est pas entièrement faux de dire que je suis surprise. Mais c'est surtout la curiosité qui l'emporte. Alors, lorsqu'elle amorce un micro mouvement pour me fausser compagnie -non s'en avoir juré de ne rien dire- je la retiens par le bras, trop de questions se bousculant dans ma tête.

Je dois avoir l'air la dernière des andouilles à la tenir et la regarder bêtement sans rien dire. Mais mes pensées se bousculent et se percutent, ne me laissant pas formuler la moindre question. Si elle connaît des vampires, peut-elle m'apprendre des choses sur ma condition ? Sur la structure et les codes sociaux ? s'ils en existent. Mon envie de toujours tout savoir et tout apprendre se meut soudainement en besoin. J'ai un besoin viscéral de tout savoir sur les vampires.

Je crois que je deviens folle. Cette constatation rationnelle sur ma soudaine nécessité irraisonnable d'avoir toutes les réponses à mes questions me rappelle à l'ordre : je tiens toujours la pauvre Amélia. Je la relâche immédiatement, m'excusant platement de mon comportement.

- Désolée ! Je ne t'ai pas fais mal j'espère ? Je ne maîtrise pas encore très bien ma force...

J'arrive à ne pas broyer un humain lambda lorsqu'il me sert de déjeuner, mais je ne suis pas sûre qu'il s'en tire sans contusion.

- J'ai plein de questions à te poser. Trouvons un endroit où discuter.

Je n'ai que vaguement conscience que je ne laisse même pas le choix à la jeune femme. Ma soudaine obsession m'enjoint silencieusement de sacrifier un peu de savoir vivre pour obtenir des réponses. Et si Amélia n'en a aucune ? Je la laisserai partir. je ne suis pas un monstre tout de même. Enfin, pas à ce point. Il y a des milliards d'habitants sur cette planète et j'ai l'éternité devant moi pour savoir tout ce que je veux savoir, sans quémander d'explications à Dante.

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Je suis sur le départ tenant encore un minimum à ma vie, surtout maintenant que j'ai retrouvé l'usage de mes deux jambes. Et puis au delà de la victime que je peux devenir à tout moment pour ces vampires, je songe aussi à Sylvana et à tout ce qu'elle a fait pour moi. et je ne tiens pas à la décevoir.
Mais elle me retient par le bras. Elle sert assez fort. Ca commence même sérieusement à piquer vu qu'elle lâche pas toute de suite prise. Elle réfléchie, elle réfléchie, elle a l'air un peu chamboulé pour je ne sais quelle raison. Lorsqu'elle revient parmi nous, elle me lâche enfin en s'excusant. Je pense que je suis au moins quitte pour un beau bleu, mais je ne vais pas regarder maintenant, on verra bien.

- Je vais m'en remettre.

Je souris un peu pincée.
Elle ne maitrise pas encore bien ? Quel âge à t'elle ? Je ne connais pas cinquante vampires, mais ceux que je connais sont vieux, voir très vieux et du coup cette question ne s'est pas encore posé. dans les deux cas, je sais que ma vie ne tient qu'à un fil en trainant avec eux. Mais d'un autre côté c'est une sacré protection d'être le calice de l'un d'entre eux ... enfin en supposant que l'autre vampire en face sache ce qu'est un calice et connaisse Sylvana, sinon je vois pas bien ce que ça peut lui faire de me bouffer (même si Sylvana en meurt), y en a peut-être même qui s'en prendrais à moi avec plaisir en sachant quel lien nous avons elle et moi.

Bref, elle veut causer, elle a plein de question. Holà ! Je suis pas sure d'être la mieux placer pour lui répondre. Je connais cet univers depuis quelques mois seulement. Et je ne sais pas si ils m'ont tout dit. Autant si Sylvana a fait ça c'est qu'elle avait un minimum confiance, mais son créateur à elle pas sur que ce soit son cas. En vérité, il ne m'avait pas encore adressé la parole. Le soir où Sylvana m'avait emmené dans leur gigantesque appartement, je n'avais rien entendu de leur échange, mais il était sorti de son bureau manifestement très en colère et avait préféré aller prendre l'air plutôt que de parler à une simple humaine comme moi, qui m'étais clairement la vie de sa très bonne amie en péril. Même Sylvana n'avait semble-t'il pas trouvé à y redire, donc ce n'est clairement pas moi qui allait l'ouvrir quoi.

- OK, je te suis, mais tu promets de pas me bouffer si mes réponses ne te convienne pas ?

Faire confiance à un vampire ? Bien vu Amélia, quelle jugeote.
Nous nous éloignons donc rapidement de l'homme entrain de dormir pour reprendre des forces suite à cette prise de sang non consentie.

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