Sortie en pleine nature... ou presque [Eliot&Amélie]

Quelques temps déjà que les jours défilent entre mes cours et ma famille, et malgré que j'y passe un maximum de temps, j'ai quand même l'impression de rater des évènements importants dans l'existence de mon petit fils. Sans doute parce qu'avec un nouveau-né, chaque nouvelle expérience, infime soit-elle, est une première fois qui ne se représentera pas. Que je le veuilles ou non, j'en raterai, c'est certain. D'un coté, il y a quelque chose de normal dans tout ça, étant donné que ces premières fois, c'est davantage à Moïra qu'à moi-même d'y assister.
Aujourd'hui, j'ai pris mon après-midi pour moi-même, pour une fois, et je crois que la couche de poussière qui s'accumule chez moi montre à quel point j'y met peu les pieds en ce moment, mais prendre une journée pour soi n'est pas synonyme de ménage, sinon, ce n'est plus une journée pour soi. Alors j'ai décidé de me diriger vers un des "poumons verts" de Chicago, et si c'est étrange d'y songer, en vérité, cette ville ne manque pas de parcs arborés en tous genres. Le Garfield Park Conservatory? Oui, je suis hors de ma zone de confort, mais j'ai la chance de ne pas être astreint à la proximité du lac pour vivre alors, autant en profiter. Même si je ne suis pas sur que prendre le bus, avec ces déviations, ces embouteillages et ces ralentissements soit le moyen le plus rapide de traverser la ville... je songe sincèrement à me mettre au vélo, pour être honnête. Je suis à peu près certain que j'irai plus vite.
Bref, faut dire ce qui est, l'endroit vaut le déplacement, et heureusement. Aussi bien pour l'intellectuel que je suis que pour n'importe quel profane appréciant les beaux paysages, si vous me permettez. Il semblerait que je sois bien parti pour effectivement y passer l'après-midi, à moins qu'une distraction se présente...

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Face a un bosquet de fleurs extraordinairement colorées pour la saison, je reste un instant fasciné, hésitant à savoir s'il s'agit réellement là d'une de ces merveilles de la nature ou si la magie n'y serait pas pour quelque chose. L'un ne vas pas sans l'autre il est vrai, car la nature ne ressemblerait sans doute pas à ce qu'elle est aujourd'hui sans l'appui de quelques races aussi discrètes que les fées, les nymphes, les farfadets et j'en passe des dizaines, mais il est vrai que parfois, la présence de la magie est si visible par ses initiés qu'il est surprenant de constater que les humains y soient si aveugles. Si feu mon épouse l'était, au même titre que les autres? J'ai longtemps voulu le croire, parce que c'était plus facile, mais en toute honnêteté, j'ai suffisamment souvent suspecté qu'elle connaissait toute la vérité à mon sujet pour regretter aujourd'hui d'avoir eu tant de secrets pour elle. Cela n'aurait certainement pas modifié la fin de notre histoire, mais il n'empêche qu'un peu d'honnêteté n'aurait surement pas fait de mal.

Une voix me sort de mes pensées, mon esprit reconnaissant le son prononcé avant que je n'ai la moindre idée de qui le prononce, cette bizarrerie qui fait qu'on peut être le plus concentré du monde sur un sujet précis, entendre son nom fait bien souvent relever la tête. Je tourne le regard vers la jeune femme qui s'adresse à moi, reconnaissant la sirène avec laquelle j'ai eu l'occasion de partager un café il y a une éternité ou deux. Sans doute pas si longtemps, mais il me semble que ces derniers mois ont été une nouvelle vie pour moi. Le retour de Moïra, la naissance de mon petit fils... les quelques désagréments survenus en ville en cours de route (oui, dans l'ordre de mes priorités, un gouffre béant dans le sous-sol de la ville est un "désagrément", principalement destiné à faire faire des détours aux transports en commun). Bref, le mot éternité n'est sans doute pas si mal choisi que cela.

"Amélie? Quel plaisir de te revoir."

Et effectivement, elle me confirme qu'il y a apparemment un moment qu'on ne s'est pas vu. Si vous cherchez le prof d'histoire qui n'est absolument pas capable de deviner l'heure sans montre, vous l'avez là. Alors de là à savoir s'il s'est écoulé une semaine ou un mois entre deux faits...

"Je visite effectivement. Je n'étais jamais venu dans cette partie de la ville. Et je dois dire que cela valait le détour. Et toi alors, que deviens-tu?"

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Amélie me parle de son ressentiment à l'égard de la situation actuelle en ville, de ce gouffre qui s'est ouvert en plein milieu du centre-ville, et de son sentiment d'insécurité au milieu des humains et de leur méfiance naturelle à l'égard de notre monde depuis lors. Je peux le comprendre, assurément, malgré la puissance que l'on prête à ma race, et à nos cousins ailés. Une légende amplement justifiée, mais au regard de ce monde dans lequel nous vivons aujourd'hui... Je ne suis pas certain que l'un des nôtres survivrait longtemps face à la technologie que nous devons affronter aujourd'hui. Le souvenir du décès de ma mère, emportée par un stupide filet de pêche placé au mauvais endroit au mauvais moment par de stupides humains bien ignorants du fait d'avoir piégé un dragon, m'est encore assez cuisant pour me servir de leçon. Ne pas les sous-estimer.

Rajoutez la capacité d'Amélie d'entendre les pensées de la plupart des gens... et je me demande même pourquoi elle n'a pas purement et simplement quitté la ville. J'ai moi-même passé plus de temps qu'à l'accoutumée dans le lac ces derniers temps, même si les raisons en sont totalement indépendantes des dernières mondanités.

"Je te prendrais pour folle, ou menteuse, si tu affirmais que cela ne t'affectes pas."

Les drows sont décidément les maitres du chaos que les histoires des elfes font d'eux, même quand ils s'éloignent de leur déesse, maitresse ès chaos s'il en est. Aucun de nous n'avait demandé à ce que leurs histoires ne deviennent les nôtres, alors que nos mondes sont aussi éloignés que le lac l'est des souterrains, malgré la flaque d'eau qu'ils appellent "lac souterrain" qui fait le lien entre eux et nous.

"En toute sincérité, je te répondrais les kelps du fond du lac, surtout quand mon petit-fils joue à cache-cache à l'intérieur. Mais les plantes terrestres ont le bon goût d'offrir une panoplie de couleurs qui dépasse de loin ce qu'on trouve dans les profondeurs. Jusqu'à présent, les camélias ont ma préférence. Et la tienne?

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